Ballade imaginaire

Publié le par JEN

 

Ballade imaginaire 

 

22 juin

Mon tendre ami,

Il m'arrive une aventure qui va te faire rire : imagine qu'à mon âge, je crois avoir séduit un homme beaucoup plus jeune que moi, assez mignon de surcroît, que je vais être obligé de décevoir.

Bien qu'il soit promis à l'échec, j'avoue tirer de ce succès, inattendu, une certaine fierté car il prouve que je suis encore séduisante. Je ne souhaite évidemment pas encourager ce pauvre garçon que je tiens par ailleurs, en grande estime et qui s'est montré jusqu'à présent d'une parfaite correction. Il y a cependant aujourd'hui dans son comportement d'infimes indices qui confortent l'intuition que j'aie depuis longtemps que je lui plais.

 

23 juin

Ma douce,

Tu as l'air surprise d'être encore en mesure de plaire. Je n'en suis aucunement étonné car tu es une femme dans la splendeur de la maturité et beaucoup d'hommes recherchent auprès de tes semblables une relation gratifiante et plus rassurante qu'avec des femmes plus jeunes mais aussi souvent plus exigeantes et accaparantes. Est-il cependant charitable de s'amuser à séduire lorsqu'on a l'intention de se dérober ?

Je note par ailleurs, une certaine incohérence dans ton propos : comment la découverte de l'inclination de cet homme peut-elle être à la fois inattendue et simultanément ressentie de longue date ?

 

25 juin

Alors que tu devrais te réjouir de ma bonne fortune, je te vois troubler mon plaisir avec tes questions. Je connais effectivement  Raphaël depuis une dizaine d'années mais nous ne sommes pas intimes. Vue notre différence d'âge, j'ai entretenu avec lui des relations cordiales, m'efforçant de le mettre à son aise car je l'ai toujours ressenti comme plutôt réservé. Pour autant, mon attitude n'a jamais été ambigüe, je ne lui ai jamais fait d'avances, ni laissé entendre qu'il pouvait me plaire. La seule légèreté que je puisse reconnaître, c'est d'avoir eu la faiblesse de répondre parfois aux petits messages sympathiques, mais très anodins, qu'il m'adresse sur Facebook de temps à autres, le soir, lorsque je suis connectée avec mes petits-enfants.

 

26 juin

Ma chère amie,

Tout s'explique donc. Il est probable que ce Raphaël t'a remarquée depuis longtemps, comme beaucoup d'hommes ou de femmes que tu ne laisses pas indifférents. Non seulement tu es belle et enjouée, mais il émane de ta personne une évidente sensualité. Il a suffit alors d'un sourire un peu plus appuyé, de quelques propos aimables ou une peu grivois pour enflammer ton soupirant qui s'est alors mis à te guetter sur Facebook. A chaque fois qu'il a pu, il t'a adressé un message amical que tu as joyeusement accueilli.

 

27 juin

Pour Facebook, je ne peux nier que Raphaël a été assez habile pour gagner ma confiance et que nos conversations sont devenues progressivement plus personnelles. Comme il est plutôt timide, je n'y ai pas vu malice. Pour le reste : mon charme ravageur, tu exagères un peu...

 

28 juin

Non je n'exagère aucunement. Peut-être n'en as-tu pas exactement conscience, mais tout en toi évoque la douceur, la gentillesse et la sensualité. Ton corps aux formes séduisantes, ta poitrine, tes jambes, ton visage... captent le regard de ceux qui, observant ce que tu dévoiles chastement, imaginent aisément ce que tu dissimules. Il est probable que ce Raphaël était dans cet état d'esprit lorsque vous avez commencé vos échanges sur Facebook et que, pour peu que tu l'encourages, ce soupirant risque de prendre de l'assurance et de ne plus être aussi timide...

 

29 juin

Mon chéri,

Je ne me savais pas si sensuelle et n'ai aucune conscience précise de l'effet que je peux exercer sur les hommes. Je doute cependant d'avoir encore le pouvoir ravageur d'enflammer si aisément les imaginations. Ton explication à propos de celui que tu qualifies de manière un peu méprisante de "soupirant" n'est cependant pas inexacte : il est devenu plus familier depuis quelques temps. Ne serais-tu pas un peu jaloux qu'on puisse soupirer pour moi ?

 

30 juin

Ce sentiment peu glorieux m'est étranger, d'autant que je le sais très inutile puisque les femmes qui en ont envie, trouvent toujours le moyen de tromper leurs maris ou leurs amants. Je crois d'ailleurs me souvenir qu'il y a une vingtaine d'années, tu es bien facilement tombée dans mes bras pour te venger de l'insupportable jalousie de ton cher époux (que je ne remercierai jamais assez). Il est normal que tu sois aimée et admirée. Si j'avais vraiment voulu me prémunir contre le risque de voir ma maîtresse convoitée, je t'aurais choisie laide et stupide.

 

1 juillet

Je m'étonne d'autant de naïveté de ta part : même les femmes laides et stupides arrivent à tromper leurs maris ! Je note donc avec satisfaction que tu n'es aucunement jaloux, ce qui eut été indigne d'un homme tel que toi. Cette largesse d'esprit tombe d'ailleurs fort bien car mon "soupirant" vient justement me faire part en termes à peine voilé de son admiration et du fait qu'il a toujours recherché la compagnie des femmes mures. Je suis assez perplexe : dois-je lui en vouloir de suggérer que je sois une "vieille peau", ou être flattée de son admiration maladroite ? En d'autres termes, dois-je briser les rêves de ce gentil Raphaël ou dois-je le laisser espérer ?

 

2 juillet

Je me garderais bien de trancher à ta place. Mon statut de vieil amant ne me donne pas le droit de prendre parti, surtout en raison du fait que des centaines de kilomètres nous séparent et que je ne peux assumer  mon devoir d'amant, qui serait de te donner le minimum de plaisir auquel toute maîtresse méritante comme toi a droit. Je comprends donc aisément qu'un amant jeune et mignon te tente. Si ce flirt t'amuses, ne me considère pas comme un obstacle. Je n'aurai qu'une exigence : que tu me tiennes informé de tes succès comme de tes déconvenues.

 

4 juillet

Tu es un amant bien complaisant pour me laisser ainsi libre de répondre aux avances (assez timides) de mon soupirant. Il n'est encore question que de badinages, mais je suis curieuse de pousser plus loin nos bavardages, ne serait-ce que pour vérifier si je ne me fais pas des illusions sur ses intentions. J'avoue que cette histoire m'amuse. Pour l'instant je rentre dans son jeu, en essayant de ne pas le décourager tout à fait. Je lui ai dit, par exemple, que j'ai un mari très jaloux qui me surveille, il m'a répondu qu'il savait être discret. Je lui ai opposé que j'étais une personne très occupée et que j'avais peu de temps pour les fantaisies, il a rétorqué que ce n'est pas la durée des rencontres qui importent mais leur intensité. En désespoir de cause, je lui ai dit que mon cœur est pris et que j'ai un amant à qui je souhaite être fidèle. Je crois que l'argument a porté car il n'a rien trouvé à me répondre. Je te tiendrai évidemment au courant de toutes les péripéties de ce gentil flirt. Sache cependant que tu es le seul homme qui compte pour moi et que je ne poursuivrai qu'avec ton plein assentiment car je n'ai aucune envie de te tromper.

 

5 juillet

Je n'ai guère envie de l'être. Note cependant que je ne considère pas le fait que tu prennes du plaisir avec un autre homme comme une tromperie. La seule fidélité que je te demande est de ne rien me cacher, d'être honnête avec moi et de toujours me faire confiance. Dans la mesure où je n'en ignore rien, tu peux donc continuer à t'amuser avec ton protégé.

 

6 juillet

Je te promets que je ne te cacherai rien. Je vais d'ailleurs te donner la teneur de son dernier message. Il vient à l'instant de m'apprendre qu'il me désire depuis dix ans, il a été séduit dès notre première rencontre. J'avoue que cet aveu m'a troublée : comment ce garçon a-t-il pu attendre si longtemps avant de se déclarer ? Je n'arrive pas à y croire tant cela semble improbable. Je n'ai jamais eu de confidences d'autres femmes sur un cas similaire, aussi ai-je la faiblesse de croire que, susciter des sentiments aussi durables, est un privilège dont peu de femmes peuvent s'enorgueillir. Je suis fière d'avoir été si longtemps l'objet d'un désir aussi secret. J'en viens même à me demander si le simple bonheur d'avoir été ainsi convoitée ne rendrait pas superflu le besoin d'aller plus loin. Je serais tentée d'en rester là.

 

8 juillet

Quelle belle égoïste tu fais ! Un adorateur se consume de désir pour toi depuis dix ans et ta seule réaction est de le laisser tomber dès qu'il se révèle ? C'est assez peu charitable de ta part d'ignorer les souffrances de ce pauvre garçon... je plaisante. Il est évident que les choses ne se sont pas passées comme tu le suggères. D'abord il n'a pas perdu tout ce temps à ne faire que te désirer. Il est probable qu'il a connu pas mal d'aventures qui ont dû lui faire oublier qu'il te convoitait... Ce n'est qu'à la faveur de l'opportunité que tu lui as généreusement offerte, avec vos confidences sur Facebook, qu'il a pu commencer à te révéler son désir. Sans vouloir anéantir tes belles illusions, il n'y a donc là rien de bien exceptionnel.

 

9 juillet

J'admets être un peu romanesque... C'est vrai que Raphaël a été un peu long à se déclarer, mais il semble qu'il ait envie de rattraper le temps perdu. Je dois, à cet égard, t'informer d'une péripétie qui va te faire sourire : je viens de m'apercevoir m'être lourdement trompée sur l'effet que devait produire mon dernier argument lui apprenant que j'ai déjà un amant. Je pensais, sur l'instant, l'avoir sérieusement refroidi, mais c'est tout le contraire qui est survenu. En effet, peu de temps après, il m'a envoyé une série de messages auxquels je ne m'attendais pas. En résumé, il prétend qu'une femme qui trompe son mari avec un premier amant, ne le fait guère plus cocu avec un second. Egalement que le besoin de jouissance des femmes infidèles révèle leur fort tempérament amoureux. Bref avec ce genre d'arguments, il en arrive à conclure que je n’ai aucune raison sérieuse de lui résister.

Sans doute aurais-je dû interrompre cet échange dès que je me suis aperçue qu'il avait abandonné son habituelle retenue, mais c'était plus fort que moi : il a fallu que je lui réponde. J'essayais en vain de dominer la situation, mais j'étais en proie à une excitation inhabituelle. Ce faisant, nos propos sont devenus assez grivois. A cours d'arguments, pour le calmer, je lui ai déclaré que mon expérience avec les hommes avait été souvent très décevante, et que, plutôt que de prendre un nouvel amant comme lui, mon inclination vers les femmes me porterait plus volontiers à rechercher la tendresse de l'une d'entre elles. J'ai l'impression qu'il ne m'a pas cru. En me quittant il m'a dit que ça ne le dérangeait pas et qu'il allait y réfléchir. Voila, mon cher ami, tu sais tout. Je suis à la fois troublée et ennuyée : décidément tout va un peu trop vite ! Je n'ai pas su calmer le jeu et je me suis fait piégée. Ne faut-il pas arrêter tout cela avant qu'il ne soit trop tard ?

 

10 juillet

Hé bien, ma pauvre chérie, tu sembles dépassée par les évènements. Je ne suis pas surpris par les réactions de notre Raphaël. J'ignore quelle a été la teneur de votre échange, mais si tu n'as pu y mettre fin, c'est logiquement que tu avais envie de continuer car tu y prends du plaisir. L'exaltation de ton soupirant a dû te troubler plus que tu n'oses le dire. Est-il d'ailleurs si timide que tu me l'as laissé entendre ? Je n’en crois rien et je n'ose pas imaginer dans quel état votre conversation a pu le mettre pour qu'il ose utiliser de tels arguments.

 

11 juillet

Je ne croyais pas utile de te le dire mais puisque tu évoques le sujet, sache qu'il m'a envoyé un ultime message pour me révéler en termes à peine voilés la manière dont il allait s'offrir quelques "soulagements" en fantasmant sur mon compte. Je ne suis pourtant pas fâchée contre lui car je me sens largement responsable de l'avoir un peu trop échauffé, ce qui me met mal à aise. Bien qu'ayant été partie prenante, j'ai l'impression de n'avoir été que la spectatrice d'un mauvais film érotique. Tout ceci n’est pas satisfaisant, j'ai peur de m'aventurer sur un chemin dangereux. Je n'arrive pas à y réfléchir en toute sérénité. Comme tu me connais mieux que quiconque, tu sauras me dire ce qui est souhaitable pour lui, pour moi... et pour toi ! Ne faudrait-il pas arrêter cette aventure au plus tôt ?

 

11 juillet

Ce serait évidemment la solution de facilité, mais est-ce la plus gratifiante ? Je n'en suis pas certain. Tu es capable de relever des défis audacieux, malgré ta tendance à être faible avec les hommes auxquels tu es attachée, comme ce fut le cas avec ton mari qui est un monstre d'égoïsme et dont tu n'as commencé à t'échapper vraiment qu'en le trompant avec moi. Je tremble même à l'idée que tu aurais pu tomber sur un amant autre que moi qui aurait profité de ta générosité et de ta naturelle gentillesse.

Je te suggère donc de relever le défi de la séduction sans te précipiter, n'y t'impliquer plus que nécessaire. Si tu n'y arrives pas, il faudra effectivement rompre. Si tu t'engages à respecter ces précautions, je serai heureux de t'aider à être vigilante et à faire en sorte que tout ceci ne reste qu'un aimable marivaudage.

 

12 juillet

J'ai honte de m'être laissée aller ainsi avec Raphaël. N'est-ce pas la preuve de ma faiblesse ? Suis-je capable de prendre de la distance et de me montrer raisonnable ? Avec ton aide je suis tentée de poursuivre l'aventure, bien que je ne sache pas où commence le marivaudage et où il se termine.

 

13 juillet

Le marivaudage est un jeu amoureux dans lequel les partenaires ne s'impliquent pas plus que nécessaire et où les sentiments sont maîtrisés. Il commence lorsque nait le désir et il finit quand l'amour s'impose.

Tu m'as demandé ce qui serait souhaitable pour lui, pour toi et pour moi ?

Pour lui, les choses sont simples : il a envie de jouir d'une femme qu'il imagine sensuelle et dont il a d'ores et déjà deviné les aptitudes  érotiques. Peut-être est-il beaucoup plus libertin que tu penses.

Toi : tu es attirée par ce garçon et flattée qu'il te désire. Il est probable, pour autant que tu le souhaites, que tu n'auras pas de difficulté à obtenir de lui toutes les satisfactions qu'une femme normale peut espérer.

Quant à moi, je souhaite d'abord que tu restes la désirable complice qui enchante mon existence et que notre relation continue à s'enrichir, y compris des fantaisies dont tu pourrais jouir avec un autre homme. Si j'accepte de te "prêter" à Raphaël c'est parce que j'ai conscience que toi et moi avançons en âge et que cette opportunité de valoriser nos fantasmes ne se présentera plus. Ce que nous pouvons vivre par ton galant interposé est une ultime et folle expérience que peu de gens sont seulement capables d'imaginer.

Souviens-toi de l'admirable suggestion d'Henri Laborit de valoriser nos "fuites dans l'imaginaire". Ton aventure avec Raphaël, qui pourrait être une simple coucherie, peut être magnifiée comme une insolite ballade dans l'imaginaire !

 

14 juillet

Présenté comme cela, c'est effectivement tentant, mais tu oublies les pièges possibles... M'aimeras-tu autant lorsque j'aurai été possédée par un autre homme ? Auras-tu encore confiance en moi ? N'y-a-t-il pas un risque que je te perde ou que tu veuilles te débarrasser de moi ? Ne deviendras-tu pas jaloux si ce jeune homme me comblait d’attention et si j'y prenais goût ?

 

14 juillet

Avant d'imaginer des pièges aussi invraisemblables, que je sais parfaitement éviter, tu devrais plutôt penser à ceux dans lesquels ta naturelle bienveillance risque de te faire tomber. Tout ceci n’est pour moi qu’un intéressant badinage, seul ton plaisir m’importe.

 

15 juillet

Excuses-moi de t'avoir posé ces questions idiotes : tu es un amant généreux, fiable et respectueux. A chaque fois que j'ai eu besoin de toi tu as toujours été exemplaire...

Je viens de recevoir un message déconcertant de Raphaël ! J'avais cru lui clouer le bec en lui indiquant mon envie d'une autre femme plutôt que d'un amant : encore une fois, j'ai mal estimé ses réactions. Il m'a, en effet, répondu qu'il respectait mon attirance pour mes semblables. Mieux, que celle-ci lui plait et qu'il s'efforcera de m'apporter exactement la sorte de plaisir qu'une femme pourrait me donner. Il me demande même d'imaginer sa tête entre mes cuisses... Je ne lui ferai aucun commentaire et j'espère que mon silence va le calmer un peu, d'autant qu'il a pris quelques jours de vacances, ce qui me donne le temps de la réflexion et de m'habituer à l'idée que je puisse éventuellement lui céder.

 

16 juillet

Le calmer ? Rien n'est moins sûr. Sa réponse, aussi grivoise soit-elle est pleine de bon sens : avec un peu d'application, il te donnera bien le même plaisir qu'une femme. Je note que pour la première fois, tu évoques le fait que tu puisses lui céder. L'idée commence donc à faire son chemin... elle semble même ne plus te traumatiser.

 

17 juillet

Mon chéri,

Je ne t'ai jamais caché que Raphaël ne me déplait pas. Je t'ai fait part des scrupules que j'avais à ton égard et des craintes plus ou moins irraisonnées qui me sont venues. Maintenant que tu les as calmées avec ton habituelle bienveillance, je m'autorise, en effet, à imaginer la chose puisque ce n'a pas l'air de t'inquiéter, ni surtout de te déplaire. Comme j'ai accepté de ne rien te cacher, je dois t'avouer que je commence à attendre avec impatience les petits messages de mon soupirant, qui, heureusement ne sont pas tous aussi tendancieux que sa dernière proposition dont je t'ai fait part et qui m'a légèrement troublée. Sache également qu'hier il m'a questionné sur cet amant dont je lui ai révélé l'existence. Je ne lui ai rien caché de tes innombrables qualités... je ne lui ai pas dit que tu es au courant de tout ce qui le concerne, car il serait probablement vexé d'être le jouet de notre mutuelle réjouissance. Je me suis bornée à lui dire que je t'ai parlé qu'un homme plus jeune que moi me courtise et que tu n'as pas l'air d'en prendre ombrage et me laisse libre de céder à la tentation.

 

18 juillet

Si ce sont là les mots exacts que tu as employés, il doit désormais se trouver en terrain conquis et avoir la certitude que tu succomberas bientôt. Je vois de mon côté que les hésitations de celle qui voulait rester dans le domaine du fantasme, ont disparu. Raphaël doit se réjouir d'avoir si bien suscité la tentation et de pouvoir recueillir les fruits de sa patience. La seule question qui se pose désormais est : quand vas-tu te sacrifier sur l'autel du plaisir ?

 

19 juillet

Tu devrais être satisfait puisque c'est toi qui m’as poussée dans ses bras et qu'en maîtresse soumise, je sens parfaitement que mon "sacrifice" te fait plaisir. Ceci dit, quand il va rentrer de vacances, j'aurai du mal à tergiverser encore... je te ferai savoir l'échéance.

 

20 juillet

Si tu es impatiente de recevoir les mots doux de ton admirateur, sache que je le suis tout autant de connaître au fur et à mesure les épisodes de cette aventure et de constater les progrès de votre relation. Avant même que tu oses m'avouer ton envie du beau Raphaël, j'avais deviné qu'il t'intéressait, sinon tu ne te serais pas vantée qu'il te fasse la cour. Tout en ne te cachant pas mon accord pour te laisser libre de prendre le plaisir que tu souhaites, j'ai laissé s'exprimer tes scrupules et tes hésitations, le temps que l'idée fasse son chemin dans ton esprit. Je  constate à présent que tu es prête pour toutes éventualités.

 

21 juillet

Oui mon chéri, je suis prête puisque c'est toi qui le veux. Je te ferai fidèlement partager tout le plaisir que je pourrais recevoir, de sorte qu'en me donnant à ce nouvel amant, c'est d'abord à toi que j'obéirai. Raphaël l'a peut-être compris lorsqu'il m'a demandé si j'avais le fantasme d'être possédée par deux amants. Je lui ai répondu que je ne suis pas différente des autres femmes... Il a ensuite cherché à savoir si je serais désireuse de réaliser un tel fantasme. Je lui ai dit que je n'en savais rien et que tu es le seul à avoir la réponse.

 

22 juillet

Ton petit Raphaël semble être devenu bien libertin... mais attention, les libertins sont comme les maris : il y en a d'excellents et de déplorables. J'essaie d'appartenir à la première catégorie en me montrant aussi généreux, respectueux et tolérant que possible et en faisant toujours passer ton plaisir et ton intérêt avant le mien. Mais il y a aussi des libertins détestables : égoïstes et prédateurs sans scrupules, véritables pervers narcissiques qu'il faut fuir. A quelle catégorie appartient Raphaël, c'est ce que tu dois découvrir dès que possible.

N'oublie pas que si j'accepte que tu fasses l'amour avec un autre homme, c'est pour ton bien-être, pour soulager tes tensions, comme si tu faisais un séance de massage pour te décontracter ou un bon exercice physique. Tu n'as aucun besoin d'un autre libertin qui enflamme ton esprit : tu l'as déjà et un te suffit ! Tu as juste besoin d'un gentil garçon qui, lorsque tu le veux te prenne avec tendresse.

 

23 juillet

Oh, mon amour, quel romantisme soudain, quelle poésie dans tes propos ! Si je ne connaissais tes hautes qualités morales, je pourrais m'inquiéter de tant de pragmatisme. Toi, tu es la crème des hommes, tu es le libertin le plus vertueux qu'on puisse imaginer. Je suis exactement dans ton schéma de pensée : nous n'avons effectivement besoin que d'un "gentil garçon" qui me fasse l'amour quand j'en ai envie, puisque l'amant qui m'embarque dans ses rêves et ses folies, je l'ai déjà.

 

25 juillet

Voluptueuse amie,

Si j'étais plus poétique, je serais ridicule... et je doute qu'avec ton bon sens tu supportes longtemps un amant qui papillonne ! J’avoue que tes frasques m’excitent et te confèrent à mes yeux, une valeur érotique supplémentaire.

 

26 juillet

Raphaël revient demain. Il voulait me voir dès la semaine prochaine, mais j'ai gagné un peu de temps en lui disant que je ne pouvais pas me libérer si tôt.

 

26 juillet

Il semble donc que tu aies réussi au delà de tes espérances... Si tu souhaites que le jeu continue, il est nécessaire de ne plus aller au devant de ses demandes et de commencer à te faire désirer. Les hommes se glorifient d'avantage à conquérir celles qui leur résistent. Tu dois donc paraître hésitante et, sans rompre le dialogue lui faire souvenir que tu es une femme respectable avec laquelle il est nécessaire d'avoir des égards : tu es une femme séduite mais encore un peu inhibée par un reste de vertu. Ce genre de coquetterie étant innée chez tes semblables, tu sauras en jouer en veillant à ce que cette captivante aventure ne tourne pas court trop vite.

 

29 juillet

Je vais essayer de suivre tes sages recommandations, bien que je pense que ce soit un peu tard... il faudra néanmoins qu'il me mérite vraiment s'il veut m'avoir dans son lit. Il va apprendre qu'il n'est pas si facile de séduire une femme "sérieuse".

Surtout qu'il ignore que, jouissant de mon cœur autant que de mon corps, c'est toi qui décideras quand tu voudras que je me donne à lui ou que je me dérobe. Je t'obéirai avec délice. Je crois que Raphaël commence à comprendre que je tergiverse... il t'appartient toujours de décider si tu veux que j'aille chez lui ou si nous renonçons.

 

30 juillet

Merci du privilège que tu me donnes de décider pour toi...  mais avons-nous fait tant d'efforts pour faillir et de ne pas profiter de notre chance ? Fais comme tu le souhaites. Que Raphaël te comble ou non, je serai fier de toi.

 

31 juillet

Merci mon amour. Je vais l'étonner... mais il ne saura pas que, quand il posera ses mains sur mes seins, ce seront les tiennes qui me caresseront. C'est toi encore qui, par jeune amant interposé, me possèdera.

Je suis encore dans l'incertitude et je n'ai pas trop envie de me faire utiliser par cet amateur de femmes mures. Je vais donc aller chez lui dans quelques jours. En attendant, laisse-moi me préparer psychologiquement car je ne suis pas encore absolument certaine d'être capable de te donner satisfaction. Dès que je pourrai, je t'informerai sur la manière dont tout s'est déroulé.

 

4 aout

Mon amour,

J'y suis allée... Je te remercie de m'avoir donné le courage d'oser. Demain, mon mari sera absent à partir de dix heures, appelle-moi sans faute, j'ai beaucoup de choses à te dire, mais je suis trop lasse ce soir.

Je sais que, quoi qu'il arrive, nous avons déjà réussi au delà de nos espérances, cette ballade enchantée dans l'imaginaire à laquelle tu m'as conviée.

Ton amante fidèle, obéissante et passionnée.

J. N. 

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