Approche logique du fait religieux - partie 3
Quand le doute s’installe, l’esprit critique s’éveille
On peut en donner un exemple simple à propos de l’âme, sujet prodigieusement intéressant car il est à la base de toutes les religions qui utilisent abondamment ce concept sous des formes et des noms divers. Il véhicule l’intuition que quelque chose d’abstrait et de sacré meut et conditionne l’individu, ses pensées, sentiments et la conscience de soi.
Cette entité semble très réelle dans ses effets, puisqu’on bouge, pense, ressent ou croit. Elle est de plus très pratique pour expliquer la cause qui nous « anime ». En conséquence, puisqu’il y a des effets, il est normal qu’il y ait une cause qui s’appelle « âme ». Cette notion satisfait pleinement le commun des mortels car elle lui permet, comme pour toute croyance, de plaquer sur son ignorance une explication plausible. Mais… d’où vient cette âme, comment est-elle logée en nous, quelle est sa nature, son mode opératoire, que devient-elle à notre décès ?
Autre problème : l'espèce humaine serait-elle la seule à posséder une âme ? Cette prétention repose sur l'illusion que les humains seraient la seule espèce crée à "l'image de Dieu". Ce qui est doublement absurde, à moins de croire à Adam et Eve et d'ignorer les découvertes de la paléontologie. Nous savons que l'homo sapiens sapiens est l'aboutissement d'une longue lignée de primates, elle-même précédée d'une encore plus longue variété de modestes mammifères qui, à l'époque des dinosaures avait plutôt l'allure d'une sorte de petit rat. Or il est difficilement imaginable que l'Eternel, qui par définition, devait préexister à cette évolution se soit un beau jour préoccupé de doter les hominidés d'une âme. Et si tel est le cas pourquoi en refuser une à nos cousins les autres primates, et à feu l'homme de Neandertal et pourquoi pas à tout autre animal ou objet de la nature, comme le font les animistes ?
Finalement, tout laisse à penser que, si elle existe, l'âme est matérielle car, cherchez bien : rien ne peut nous laisser postuler qu’elle soit immatérielle. Mieux, les neurosciences démontrent que tout ce qui caractérise intimement un individu : ses émotions, sa capacité sensorielle ou d’empathie, sa faculté de mémoriser, ses intuitions et jusqu’à ses croyances et ses lubies, est intégralement régi par le cerveau. Si l’humain a une âme qui serait son principe vital, tout démontre clairement qu’elle a son siège dans le cerveau et le cortex préfrontal, qui constitue le privilège de notre espèce. Or, sans cerveau (matériel), que devient l’âme ?
Si l’âme est matérielle, elle donc est périssable et ne peut nous survivre en aucune manière (à moins de savoir conserver, comme dans les films de science fiction, un cerveau tout seul en état de marche dans un bocal).
Si donc elle est périssable, cela signifie qu’on ne peut survivre à sa mort. La vie future, qu’elle soit au paradis ou en enfer (sans parler de purgatoire ou de limbes, passés de mode) serait hélas, une vaine espérance. D'autant que, malgré qu'on les ait si désespérément cherché, on n'a pas encore trouvé ni l'enfer, ni le paradis. Dans ces conditions que deviennent les sanctions ou de récompenses promises dans l'au-delà et les promesses de vie éternelle si chèrement promises par les prêtres ? Et même : le bien et le mal, sources d'une morale strictement religieuse ?
Cette démarche incrédule part d'un questionnement rigoureux et sans complaisance. Elle est celle des philosophes qui appliquent une pensée logique non inhibée. La plupart n'osaient pas s'exprimer à propos des religions, ou se contentaient d'en faire un historique bienveillant, sans oser pointer les véritables questions. C'est aussi celle naturelle chez les athées qui occupent une place nouvelle dans une société qui recherche une nouvelle spiritualité où l’humain détrône les dieux.
suite partie 4